Kim Yarbrough
L'émission "blues" de radio RDL Colmar animée par Jean-Luc et David BAERST

Kim, afin de débuter cet entretien, peux-tu me parler de tes origines ?
Je suis originaire de New-York mais je vis à Paris. La première fois que je suis venu dans la capitale française, c’était dans le cadre de vacances. J’en avais profité afin de rencontrer un maximum de musiciens…
D’ailleurs je m’y suis fait un ami qui m’a sollicité, un jour, afin de faire un remplacement au sein d’un groupe qui avait quelques concerts de prévu. J’ai accepté sa proposition. Si j’étais venu pour des vacances, je pouvais bien y retourner pour gagner de l’argent…

J’ai fait ces quelques concerts et j’ai été payé. Au bout d’un certains temps, le même groupe m’a re-contacté. Le rythme des concerts devenant assez intensif, j’ai commencé à me demander s’il ne serait pas plus judicieux pour moi de rester ici. C’est-ce que j’ai fait, il y a quinze ans de cela (rires) !
Durant cette période j’ai accompagné de nombreux artistes différents, qu’ils soient chanteurs ou musiciens français. J’ai aussi joué aux côtés d’américains qui venaient se produire dans le cadre de tournées européennes.

Etait-il, à ce point, plus facile pour toi de trouver du travail en France plutôt qu’aux USA?
Ce n’est pas plus facile. C’est simplement une question de rencontres et d’opportunités. Si je joue en Allemagne, on va aussi me solliciter pour y faire des concerts et y accompagner des gens, de même qu’aux Etats-Unis. Il m’arrive fréquemment de partir jouer dans un pays puis de revenir quelques temps plus tard…

Peux-tu me parler, plus en détails, des premiers musiciens français que tu a côtoyés ?
Comme je te le disais, j’étais ici en vacances où des gens m’ont présenté à quelques musiciens. Parmi eux, je suis devenu bon ami avec un africain qui m’a proposé de jouer avec lui et de rejoindre son groupe.

A quand remonte ton apprentissage de la basse et pour quelles raisons t’es-tu passionné pour cet instrument ?
C’est une longue histoire que je vais essayer de résumer le plus brièvement possible…
En fait j’ai commencé à jouer de la guitare à l’âge de 12 ans, dans le sillage de mon grand frère qui pratiquait déjà cet instrument.

Alors que j’avais 15 ans, nous avons décidé de jouer ensemble. Il m’a dit que si nous voulions faire cela, nous ne pourrions pas jouer tous les deux du même instrument. A mon avis, il ne voulait pas créer d’atmosphère de compétition entre nous deux.
Il m’a proposé de faire de la basse. Je n’étais qu’un jeune adolescent un peu naïf et je lui ai dit, sans aucune forme d'opposition, que j’étais d’accord.

Dans un premier temps, un ami m’a prêté sa basse afin que j’en maîtrise les rudiments. Puis mon frère a proposé à mon grand-père de m’en offrir une. Nous sommes allés au magasin tous ensemble où il m’a acheté ce précieux objet. Un instrument avec lequel je joue encore aujourd’hui. C’est donc à cause ou grâce à mon frère que je suis devenu bassiste aujourd’hui.

Quels sont les premiers bassistes qui t’ont  influencé ?
Le premier bassiste qui m’a influencé et, sans aucune contestation possible, Larry Graham qui était membre du groupe de funk Sly & The Family Stone (de 1967 à 1972, nda). Par la suite il a quitté ce groupe afin de fonder son propre combo, Graham Central Station.

La première fois que je l’ai entendu je me suis dit : « Je veux absolument jouer comme lui, je veux avoir ce son et ce même pouvoir sur l’instrument ». Je suis, réellement, tombé amoureux de son style et j’ai, dès lors, dit à mon frère que j’étais d’accord pour continuer à faire de la basse.

Musicalement, on sent que le funk est ta plus grosse influence musicale…
En ce qui concerne la basse, oui !
La première chose qui me vient à l’esprit lorsque je touche une basse est le mot funk !

A mes débuts de musicien, alors que je pratiquais la guitare, je jouais de nombreux styles différents : du rock et de nombreux autres types de musiques. La première fois que j’ai entendu de la basse dans un morceau de funk j’ai, immédiatement, su quelle était la direction que j’allais emprunter.

A cette période, quels étaient les genres musicaux les plus influents à NewYork ?
A cette période, le funk était vraiment à son apogée. C’était le début de grands noms de cette musique comme Bootsy Collins, Larry Graham, Louis Johnson et même Marcus Miller (devenu l'un des plus grands bassistes de jazz fusion, nda) lequel est de ma génération.

Il a donc aimé les mêmes choses que moi et sait jouer dans le même esprit que Larry Graham. Si tu sais jouer comme Larry, tu sais tout jouer et tu peux tout te permettre!

As-tu effectué de nombreux concerts à New-York ? Si oui, était-ce avec ton frère ou avec un autre groupe ?
Oui, mon frère et moi, avons commencé à travailler ensemble. Cependant nos premiers réels contrats professionnels ont été effectués avec un groupe de rythm and blues qui cherchait, justement, un bassiste et un guitariste. Mon frère étant, aussi, un bon compositeur a écrit pour ce groupe.

Quelle est la plus belle expérience que tu as vécue là-bas ?
Je ne peux pas répondre précisément à cette question. Il y a une telle richesse et une telle diversité musicale dans cette ville que les expériences professionnelles ont vraiment été multiples. Nous avons eu l’opportunité de jouer avec beaucoup d’artistes différents.

Mon frère connaissait un membre de l’équipe du groupe Funkadelic (fondé en 1964 par George Clinton, Nda) qui a été à deux doigts de nous faire intégrer ce combo mythique. Il a aussi contacté un groupe nommé Heatwave dont il  produit les premiers enregistrements. C’est ainsi que nous pouvons résumer les débuts des « Yarbrough Brothers » !

Etais-tu surpris, en t’installant en France, d’y trouver autant de musiciens. Quelle était ta vision de la scène locale à cette période ?
A ce moment là nous pouvions pratiquer de nombreux genres musicaux différents. Il y avait beaucoup de Rock et une grande influence du « vieux » rythm and blues noir incarné par James Brown, Aretha Franklin etc… Il y avait beaucoup de scènes différentes…

De plus je me suis retrouvé au milieu d’un vivier de musiciens américains. Je me serais cru à New York, c’était très étrange…
C’est avec eux que j’ai commencé à travailler. C’était vraiment un belle période et une belle scène, à ce moment là, la France…



Justement quels sont les musiciens avec qui tu as travaillé ici ?
J’ai travaillé avec Bernard Allison, Screamin’ Jay Hawkins ainsi qu’avec un groupe nommé The Last Poets. Ce dernier était précurseur du mouvement rap et avait débuté dans les années 1960 (en 1968 à Harlem, le jour de l‘anniversaire de Malcom X, nda). Les textes employés étaient très revendicatifs et politiques, c’était intéressant…
J’ai aussi joué avec Bobby Rush…

As-tu accompagné Bobby Rush en Europe ou aux États-Unis ?
La première fois que j’ai rencontré Bobby, c’était à Memphis Tennessee…
J’étais en tournée américaine avec Bernard Allison et nous y enregistrions un album produit par Jim Gaines (qui a, par le passé, travaillé avec Stevie Ray Vaughan et tant d’autres)…
Bobby est un très bon ami de la famille Allison…

D’ailleurs il m’a raconté une belle histoire, il y a un an, après un concert durant lequel je l’accompagnais. C'était dans le cadre d’un Festival. Il m’a dit que c’est lui qui a présenté la mère de Bernard à Luther Allison. Bernard doit donc d’avoir vu le jour grâce à Bobby !

La deuxième fois que j’ai vu Bobby Rush c’était au Japon. J’étais toujours en tournée avec Bernard Allison et nous partagions l’affiche avec lui (et beaucoup d’autres grands noms du Blues)...

Il doit te rester beaucoup d’anecdotes de toutes ces rencontres…
Je ne sais pas vraiment si ce sont les anecdotes ou les histoires drôles qui me marquent le plus avec le recul. La chose qui me touche le plus et de penser à tous ces voyages, ces Festivals à travers le monde (et spécialement aux USA), ces gens croisés aux quatre coins de la planète.

Ainsi que le fait de passer du temps et de parler avec des artistes que j’admirais lorsque je n’étais qu’un gamin. C’est inoubliable, chaque rencontre est un véritable bonheur…

Dernièrement tu as enregistré avec une jeune femme française qui se nomme Nina Attal. Que penses-tu d’elle ?
(Rires) Comment sais-tu que j’ai travaillé avec elle (cet entretien avait été réalisé quelques jours avant la sortie du premier disque de Nina, nda) ?

Je crois qu’elle peut vraiment prétendre à faire quelque chose de grand de sa carrière…
C’est une sensation que je ressens, une vibration intérieure que je n’arrive pas à expliquer. Je crois sincèrement en elle et je lui souhaite beaucoup de réussite.

Tu es un accompagnateur réputé mais il t’arrive aussi de te produire sous ton propre nom. As-tu un groupe attitré ici en Europe ?
J’ai un groupe avec lequel j’essaye de travailler autant que je le peux. Nous avons enregistré un CD qui est sorti en 2002 et nous nous produisons dans un registre jazz-funk. Je m’inspire beaucoup d’artistes tels que Joe Sample que j’adore…

Avec ce groupe, interprètes-tu tes propres compositions ?
Oui j’écris les musiques. Sur cet album nous avons onze chansons dont plus de la moitié sont des compositions originales. Les autres sont des reprises…

Quels sont tes prochains projets ?
J’aimerais enregistrer un nouvel album. Le fait de travailler pour moi-même et un souhait qui m’est très cher. Je veux me donner le temps d’écrire et de réaliser un nouvel opus…

Est-ce un disque que tu souhaites enregistrer en Europe ou aux USA ?
C’est quelque chose que j’étudie actuellement, je suis sur différentes pistes et j’ai plusieurs idées.
Il n’est pas impossible que Bobby Rush se joigne au projet. L’année dernier, lors du festival dont je te parlais précédemment, j’ai interprété quelques uns de mes propres morceaux lors du soundcheck (réglage du son avant un concert, nda) et cela l’a immédiatement intéressé. Il m’a demandé qui avait écrit ces titres
.

Quand je lui ai dit qu’il s’agit de mes propres compositions, il a répliqué « Hey, j’aimerais en chanter quelques unes comme ça ». Je l’ai donc invité à le faire avec moi…
Ceci dit je sais très bien qu’il est très occupé et qu’il passe énormément de temps sur les routes, en tournée…
Il va falloir trouver le bon moment, et l’argent pour le faire bien sûr…

En dehors de cette collaboration avec Bobby, quel serait ton rêve pour l’avenir ?
Mon rêve… c’est une bonne question !
Que tout le monde soit heureux et puisse profiter de la vie…

Souhaites-tu ajouter une conclusion ?
Dire que j’aime les gens…
Je suis heureux de savoir que les gens se déplacent encore pour aller voir des concerts. J’espère qu’ils seront contents du travail que je vais fournir pour eux et qu’ils y prendront beaucoup de plaisir.

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Interview réalisée
au Caf’ Conf’ d'Ensisheim
le 3 mai 2010

Propos recueillis par
David BAERST

En exclusivité !

 

 

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